Une réflexion au passage.

Comme « la gauche » et « la droite » sont des catégories qui ont cessé d’être opérationnelles, on peut peut-être se demander la même chose concernant les catégories « riches » et « pauvres ». À l’heure du crédit revolving, du Big data et de la servitude volontaire aux gadgets et autres modèles commerciaux de la « nouvelle économie », il est permis de se poser la question.

Il est incontestable que des « super-riches » deviennent de plus en plus riches et des « super-pauvres » de plus en plus pauvres grâce à/aux dépens d’une classe moyenne qui, devant la raréfaction de l’emploi, commencent à craindre pour sa survie.

Il est intéressant de noter que la réussite financière ou l’adhésion au système financier s’affichent, sinon en noir, au moins en très sombre. Le noir se discute moins pour les voitures : grosses cylindrées allemandes, 4×4 de taille impressionnante (parfois munies de pare-buffle dont la présence nous inciterait presque à introduire ce bovidé dans l’espace urbain pour contourner la non utilité de l’ustensile).
Si l’on compare à l’affichage ostentatoire et baroque du Sud, des tziganes, dont les vierges en dentelle s’exhibent fièrement, et parfois dans les dépôts de nos déchets récupérés, on se dit qu’on a là un résumé de Max Weber.

Il y aurait une étude ethnographique à faire sur les possesseurs de ces véhicules sombres : qui possède vraiment ? Qui est détenteur d’un leasing en (se) donnant l’impression qu’il peut posséder ? Qui adhère aux valeurs de l’entreprise qui permet de donner l’illusion qu’on possède un tel véhicule ? etc. En reprenant la notion de valeur-signe, de Jean Baudrillard, on pourrait voir en quoi le véhicule est vecteur d’illusion, de frustration, de manque, etc.

J’ai connu un individu qui était très fier de sa Volkswagen Touran et son comportement agressif au volant traduisait l’incapacité qu’il avait eue de s’offrir une Porsche Cayenne !

J’ai connu, il y a fort longtemps, un libéral convaincu qui n’accumulait pas plus qu’il pouvait tenir dans ses deux mains, embrasser d’un seul regard. Les capitalistes le tuèrent, après que les marxistes l’aient confondu. Aimé Shaman