Intermède Zoo 2

Pauvres comme jobs   

Assisté, nm. : Dans la rhétorique journalistico-politicienne, personne qui se voit refuser l’accès aux moyens qui assureraient sa subsistance, mais non point à ceux qui lui permettent de faire durer un peu son agonie et celle de sa famille parmi l’opprobre. On voudrait bien pouvoir se débarrasser définitivement de ces vampires et de ces parasites ; mais ils nous prennent de vitesse.

Stéphane Legrand. Dictionnaire du pire.

From bullshit job – And what about to shift job?

Une hypothèse pour l’analyse à venir de l’organisation du travail : Le télé-travail est un bon indicateur pour qualifier un poste de bullshit job, ou non.

Une grande proportion des postes que les entreprises vont requalifier en télé-travail correspond aux activités que David Graeber avait définies comme « bullshit Jobs ». Un nombre non négligeable de ces jobs risquent de faire les frais des réorganisations, l’argument économique fonctionnant comme déculpabilisant pour les directions.

Les arguments pour justifier les suppressions de postes seront toujours les mêmes, à savoir, paradoxalement, la nécessité de se séparer de collaborateurs pour pouvoir maintenir des emplois ! Mais l’important sera sauf : pas de culpabilisation des managers et sauvegarde des dividendes.

On se réjouit déjà d’assister aux repas des « cannibales en costume » !

Mon propos concerne bien entendu les entreprises d’une certaine importance. Les petits indépendants, les artisans, les précaires, les intermittents, etc. ne sont naturellement pas concernés par mon propos, puisqu’il est question de bullshit. De toute façon, toutes ces catégories ont l’habitude de vivre des difficultés.

Par contre, parmi les titulaires de bullshit jobs, certains découvriront qu’ils étaient « surévalués ». Pour ceux-ci, l’avenir réserve quelques surprises.

« Networking enhancement », « innovative strategies », « global innovation insight » : ces nouveaux secteurs d’activité ont donné naissance à des métiers aux intitulés intergalactiques et incompréhensibles. Faut-il en rire ou au contraire s’en réjouir ?

Gaspard Koenig, Les Echos, 2018.01.09.

Je rappelle pour mémoire l’analyse de David Graeber. Il divise les « bullshit jobs » en cinq catégories – pour l’essentiel, d’après Wikipedia  :

  • Les « larbins » ou « faire-valoir », servant à mettre en valeur les supérieurs hiérarchiques ou les clients
  • Les « porte-flingue » ou « sbires », recrutés car les concurrents emploient déjà quelqu’un à ce poste, et dont le travail a une dimension agressive
  • Les « rafistoleurs » ou « sparadraps », employés pour résoudre des problèmes qui auraient pu être évités
  • Les « cocheurs de cases », recrutés pour permettre à une organisation de prétendre qu’elle traite un problème qu’elle n’a aucune intention de résoudre
  • Les « petits chefs » ou « contremaîtres », surveillant des personnes travaillant déjà de façon autonome.

Pour Graeber, les bullshit jobs font partie d’un système qui maintient au pouvoir le capital financier : La classe dirigeante s’est rendu compte qu’une population heureuse et productive avec du temps libre était un danger mortel. Il note par ailleurs l’existence d’un corollaire paradoxal : plus un travail est utile à la société et moins il est payé. Et bien souvent déconsidéré, même si Graeber reconnaît quelques exceptions, comme les médecins.

L’auteur nous dit que le neo-libéralisme est arrivé au même point que le système soviétique, c’est-à-dire à employer un très grand nombre de personnes à ne rien faire. Ce n’est naturellement pas l’avis de nombreux économistes qui justifient ces jobs par la complexification des processus de production et de distribution.

Pour le philosophe canadien Alain Deneault, que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer dans des billets précédents, c’est surtout l’organisation actuelle du monde du travail qui est en cause. 

Des chercheurs, spécialistes des pathologies liées au monde du travail, ont décrit le malaise des travailleurs victimes de bullshit jobs. Ils parlent de brown-out (qui signifie littéralement « baisse de courant ») pour un salarié qui ne comprend pas (ou plus) son travail ou marque une incompréhension de plus en plus prononcée par rapport aux finalités de son travail.

L’année qui vient annonce beaucoup de terrains d’analyses très intéressantes pour celles et ceux qui aiment se poser des questions, sans rechercher nécessairement la certitude de réponses.

Does Corona make america great again ? yes, it can !

© Reiser. Hara-Kiri

En date du 12 mai 2020, les USA enregistre encore un certain retard (nb de morts/million d’habitants) : 252,  contre 580 à l’Espagne, 489 au Royaume Uni, 414 à la France. Mais il semble que la manière de compter les points prête à des critiques : le Brésil, avec 59, La Russie avec 15,  l’Inde avec 2, la Chine , avec 3, ne semblent pas jouer dans la même ligue.

Des BRIC qui n’en cassent pas, voilà qui met en cause le thermomètre.

Il y a bien une colonne – ne figure pas sur l’illustration – du tableau mentionnant le nb de tests / million de population, mais je me méfie des chiffres élevés (même si j’accorde un certain crédit aux 3, 5 du Brésil).

Etat au 12 mai 2020 https://www.worldometers.info/coronavirus/

Politique de l’extrême-centre…

N’est pas André Gide qui veut : à force de se déclarer de gauche, mais, on a fini par évider de leur contenu les premières [les « valeurs de gauche »] au profit de mesures conjoncturelles les contredisant.

Alain Deneault, Politique de l’extrême centre. 2016 :7
© Vigousse. 2020.05.08

Dans un billet précédent concernant les socialistes et le versement de dividendes, je m’étais réjouis de voir s’enrichir mon « concept » de schizoïdie fonctionnelle. Je ne peux qu’à nouveau m’esbaudir… Pourvu que le parti n’exige pas de moi le versement de commissions…

Je reporte encore à plus tard le moment d’extraire des citations du livre de Jorion (2017 [2009]), L’argent, mode d’emploi. À chaque moment, dans ce livre, des extraits et des exemples qui cassent les idées reçues. Je dois changer mon idée de départ et procéder autrement. Mais comment ? Je pense que je vais prendre l’option de plusieurs épisodes, car, même, pour Dallas,…

(À suivre…)

Vivement qu’on me sonde pour que je puisse me faire une opinion

Aimé Shaman