Des moches -Craties … _ 2

Des moches -Craties … _ 2

Kratos (Cratos) and Euphrosyne (Euthymia) © Meisterdrucke

Grec Kratos ou Cratos : est une divinité représentant la force, le pouvoir, la vigueur. Grec Archos : Maître, chef, dirigeant.

Il faut que l’imagination pense trop pour que la pensée ait assez.

Gaston Bachelard.

Par quoi remplacer la démocratie ?

Un ami, chez moi, entre la poire et le fromage : ” Changer la démocratie… Tu la remplaces par quoi ? « . C’est le moment rêvé où l’on tente des répnses plutôt que d’utiliser un joker.

En référence aux étymologies, on pourrait conclure rapidement qu’il faudrait que la démocratie cède la place à la démo-archie.

Si je suis capable de répondre de façon pertinente à la question, cet ami a des excellents fréquentations. Mais selon la réponse que je donne à cet ami, il y a peut-être des chances que cet ami ne soit plus de mes amis car je serai devenu le « représentant » d’un Demos que j’estime ne plus être représenté, donc non repésentatif.

Et fort de ma raison, j’exercerai mon -cratos d’une manière rationnelle. La technique me le permettant, la gouvernance se fera par les nombres [1] : la raison sera devenue aveugle et ma folie parfaitement rationnelle.

[1] Voir Alain Supiot, 2020, La Gouvernance par les nombres Cours au Collège de France (2012-2

Suite au post du 2 mai 2024

Il ne faut rien attendre des traitements symptomatiques de la « crise » car il n’y a plus de crise : un nouveau système s’est mis en place qui abolit massivement « le travail ». (André Gorz. Misères du présent, richesse du possible)

Première affirmation

Dans le cadre de l’actuelle société et de l’actuel modèle de consommation, fondées sur l’inégalité, le privilège et la recherche du profit, la non-croissance ou la croissance négative peuvent seulement signifier stagnation, chômage, accroissement de l’écart qui sépare riches et pauvres. Dans le cadre de l’actuel mode de production, il n’est pas possible de limiter ou de bloquer la croissance tout en répartissant plus équitablement les biens disponibles. Gorz, André.1973. Leur écologie et la nôtre.

Pour pouvoir juger d’alternatives « à la démocratie », il faut faire un saut paradigmatique.

Paradigme, comme concept, sont devenus aujourd’hui des « mots-amibes »[1] : ils finissent par ne plus rien signifier ou plutôt signifier tout ce que l’on veut leur faire dire. J’essaye d’employer paradigme au sens de Kuhn[2].

Première proposition

Plutôt que de vouloir remplacer « La Démocratie » – en ne sachant pas très bien de quoi il s’agit –, il faudrait s’attacher à faire fonctionner ce qu’on appelle « La Démocratie » de la façon à ce qu’elle prétend être, à savoir une direction par un « peuple » et non ce qu’elle est devenue, à savoir l’exercice d’un pouvoir, par des représentants qui, dans la majorité des cas, sont préoccupés par la continuité de ce pouvoir[3].

Le mythe fondateur : la démocratie athénienne

L’origine de la démocratie, c’est Athènes. La démocratie athénienne repose sur trois piliers :

  1. le droit de tous les citoyens à la parole, à l’assemblée du peuple comme devant les tribunaux ;
  2. l’accès de tous les citoyens aux fonctions publiques, par élection ou tirage au sort ;
  3. l’égalité de tous devant la loi.

On y est tous égaux – surtout certains -, la citoyenneté excluant les femmes, les barbares, les esclaves…

L’exercice du pouvoir s’y fait directement par le démos, unité bien définie comme celle des citoyens de la ville d’Athènes, petite unitié relativement maîtrisable[4]

En considérant simplement cet aspect, il faudrait peut-être, sinon changer « La Démocratie », au moins changer le terme qui désigne nos régimes contemporains.

Monnaie-toi toi-même et tu monnayeras et le Ciel et les Dieux

Aymé Shaman, du haut du Mont Pélerin

La Démocratie qui nous con(c)(st)erne

Le pouvoir central renforcera son contrôle sur la société : des technocrates calculeront des normes “optimales” de dépollution et de production, édicteront des réglementations, étendront les domaines de “vie programmée” et le champ d’activité des appareils de répression.Gorz, André.1973. Leur écologie et la nôtre.)

Sortie de la période athénienne… Le capitalisme s’est paré des habits de la démocratie.  On trouve désormais dans sa garde-robe les retouches néolibérales de l’économie,  les ciseaux de la judiciarisation à outrance – La norme contractuelle se substituant à une « morale » – censée, entre autre, protéger des risques qu’un système libéral-libertaire fait naître. 

Un régime d’éthique des droits [5] permet de rendre l’ensemble de la mise seyante et acceptable pour tous, dans l’illusion de liberté qu’éprouve l’esclave, tant qu’il peut contempler un sous-esclave.

Tout Est Permis mais Rien n’est Possible

Michel Clouscard

L’extrême flexibilité du capitalisme, son intelligence, permet de faire croire aux prolétaires consommateurs qu’ils sont libres et que toute tentative de priver le capitalisme de rendements et de croissance est une atteinte à la liberté des individus. Génial !

Les super-riches ont les moyens de prévoir leur enfermement, dans des bunkers, sous leurs villa dans des lieux de rêve, où ils se sont isolés : le super fétiche argent a le pouvoir de faire croire que l’auto enfermement est une liberté. Quelle différence avec l’enfermement du prisonnier de droit commun, dans une cellule de merde ! Ça vaut la peine de détourner le bien commun, au lieu de voler les biens privés.


[1] Le linguiste Uwe Pörsken définit un « mot plastique » (ou « mot amibe ») comme ayant d’abord appartenu à la langue courante, où il possède un sens clair et précis, puis d’avoir été utilisé par la langue savante avant d’être repris aujourd’hui par la langue des technocrates dans un sens si extensif qu’il ne signifie plus rien, sinon ce que veut lui faire dire le locuteur individuel qui l’emploie. (Delaleu Didier, 2014:22, Droit de l’O.H.M. et Devoir d’humanité)

[2] Le terme de paradigme, utilisé par Thomas Samuel Kuhn, en 1962, dans La structure des révolutions scientifiques,  ne désigne pas un modèle quelconque. Pour Kuhn, il s’agit des principes  et méthodes partagés par une communauté scientifique. C’est un modèle  épistémique qui fait autorité et regroupe les chercheurs pour un temps.  Puis sera remplacé par un autre, après une révolution scientifique. Une  telle révolution change profondément les manières de voir le Monde.  

[3] Je perçois de telles variétés de niveaux et de telles imbrications qu’l me faudrait commencer à apprendre à écrire comme Jean-Claude Michéa et pratiquer des parenthèses dans les parenthèses.

[4] Voir le livre de Olivier Rey, 2014, Une question de taille.

[5] En ce qui concerne au moins les « vieilles démocraties » car, dans certains pays, cette éhique des droits est loin d’être menacée par ce que Mark Hunyadi, empruntant à Patrick Tort, appelle son « effet réversif ».