Pas de solutions clé-en-main

Pas de solutions clé-en-main

Oui, mais…             

Université de Neuchâtel. Quand il s’est agi de rebaptiser la Faculté des lettres « Faculté des lettres et des sciences humaines », il paraît que la Fac. de Droit s’y opposait, au prétexte que le Droit est une science humaine. Si seulement… Le Droit se rapprocherait alors considérablement de la justice !

Suite à échange avec Frédéric

Je vais certainement décevoir au niveau des propositions de solutions, même si je suis convaincu du point d’où peuvent partir les conditions de changement(s) qui, s’il se réalise créera certainement les besoins de nouvelles solutions ! Mais je remâche toujours mes mêmes limites. Et je continuerai tant que mon cynisme ne tuera pas mon enthousiasme.

Le concept (j’oserai ce mot tant que des entraîneurs de foot ou des banquiers parleront de « changement de paradigme), le concept donc de « schizoïdie fonctionnelle » que j’ai énoncé m’impose de rester au niveau des constats, sous peine d’être victime de la pathologie qu’il décrit.

 Si je connaissais des solutions – l’ébauche n’étant souvent que la conviction de la validité de la thérapie – j’appartiendrais à ce que je diagnostique, car j’aurais été récupéré, ma « start-up » ayant été rachetée fort cher par des GAFAM…Uber & Co.

Tous ces libertariens ont besoin de la contestation pour se penser libertaires. Et si un jour, quelqu’un trouve une ébauche de solution pour sortir du court-termisme et de la financiarisation, ils auront les moyens de le racheter ou le faire taire.

Le petit paysan qui veut garder ses semences ne peut rien contre les armées d’avocats de Monsanto. Pour reprendre le concept de « contre-productivité » cher à Ivan Illich, la judiciarisation est la contre productivité du droit.

La seule chose dont je suis convaincu, c’est qu’il faut « convaincre sur le diagnostic » pour donner envie aux citoyens de sortir de l’état de servitude volontaire dans lequel il se / on le maintient.

Le seul élément sur lequel je peux avoir un contrôle, c’est moi-même. Et encore ! Le marketing, les algorithmes, les services de communication diront peut-être que c’est déjà trop tard. Il n’empêche que depuis les nombreuses années ou je ne regarde plus TF1, M6,… et que je m’efforce autour de moi de convaincre de ne plus le faire (même si j’ai doit aux ricannements et à la remarque que « Ça ne sert à rien »), j’ai eu une influence sur l’audimat. Et l’audimat a une influence sur les tarifs auxquels les chaînes peuvent vendre le « temps de cerveau disponible ».

Si 60-80 % des citoyens étaient capables de faire la grève de la télé pour manifester contre les séries policières, contre  Joséphine Ange gardien  et autres Soap, pour « autre chose » – par exemple, des émissions expliquant que le paysan a, depuis toujours, effectuer des manipulations génétiques, ce qui fait que les débats sur les OGM n’est peut-être qu’un débat « économique », que notre société de consommation des sociétés de consommation que dans un système économique permettant une externalisation des nuisances et une scotomisation de la notion de « Communs » -, les citoyens créeraient des conditions de changement(s), faisant renaître par la même occasion les conditions d’un exercice de la démocratie.

Les chutes d’audimat occasionneraient, c’est certain les conditions d’un changement. Lequel ? Je ne sais pas, mais la renégociation des individus avec leur « dépendance », dans une « société addictogène » qui est la nôtre, provoquerait une crise, donc des opportunités.

Dans l’état actuel de financiarisation et court-termiste, de  poids financiers, de lobbyismes, de judiciarisation, etc., toute personne qui prétend être porteuse d’une solution est forcément porteuse d’une idéologie qui lui permet de dépasser les contradictions de son discours.

Dans une société de consommation et d’obsolescence programmée, donc qui produit des déchets, nos ressources sont dans nos poubelles. Et si je veux faire une campagne pour économiser l’énergie, la faire connaître occasionne une dépense supplémentaire d’énergie ! Schizoïdie fonctionnelle.

Aparté : pub vu sur une bâche d’un dépôt d’ordures, en bordure d’autoroute, à côté de Grenoble : « Veolia – nous faisons de vos déchets une ressource ».

J’ai eu l’occasion, début 2017, de me faire refuser un article (De la démocratie en numérique) pour un bouquin sur le thème : Être acteur dans une démocratie technique. Sans sous-estimer d’éventuelles blessures d’ego au refus de ma production intellectuelle, j’ai eu l’occasion de voir que les conditions de cette production avaient changé et que, devenu peut-être un vieux con, cela ne m’intéressait pas de jouer dans des cérémonies qui ne sont là que pour fonder l’importance de ceux qui jugent, sans aborder la pertinence ou non des contenus.

Aparté : voir l’université française et ses débats au sein de la science économique. Le nombre de profs « orthodoxes » par rapport au nombre de profs « hétérodoxes », leurs importances respectives et leur rôle dans les comités de lecture, la polémique occasionnée à l’occasion de la nomination de Jean Tirole au Prix de la Banque de Suède, baptisé abusivement « Prix Nobel d’économie », etc.

Donc il m’étonnerait fort que je dépense de l’énergie pour écrire un bouquin. Par contre, ton livre m’a donné des idées, à destination de mes enfants : l’idée de reprendre mes photos de famille et leur raconter des souvenirs en prenant prétexte de ces photos. Je considère le rapport coût/bénéfice d’un tel exercice bien supérieur à un coup d’épée dans le flot des solutions sans pouvoir sur les dispositifs technocratiques.

Cette conclusion me paraît optimiste dans la mesure où le citoyen Delaleu ne se sent pas dépossédé de SA voix par des pouvoirs de « gouvernance », les gouvernements ayant depuis longtemps abdiqué devant la « rationalité » de la main invisible, de la « transparence » du marché,…

Là, j’espère que mes remarques serviront à documenter une opinion, la rendant plus consciente à un état éventuel de « servitude volontaire ».

Ainsi Dieu ? Insidieux ! 

Aimé Shaman