Sémantique pour thèmes en kit.

Sémantique pour thèmes en kit.

La sémantique au secours des consciences.
Actuellement, semble émerger dans les médias une tendance, celle qui consiste à établir un subtil distinguo entre « migrants » et « réfugiés ». Cette distinction est reprise par les différents atomes de « l’opinion publique », à savoir « l’homme de la rue ». Et chacun de développer les arguments à l’appui de cette distinction…
La forme que prend cette reprise se présente le plus souvent : « c’est pas des migrants, c’est des réfugiés », « Ce ne sont pas des migrants : c’est des réfugiés ». On peut remarquer, dans le deuxième cas, que le pluriel des migrants dans « l’être » fait place au singulier des réfugiés. Est-ce que cela pourrait recouvrir un acte manqué, une inquiétude subliminale : le migrant passe et le réfugié reste ?

Voir Le Robert. Dictionnaire historique de la langue française, pour la suite et le détail des étymologies (illustrations jointes ci-dessous).

Chaque année, dans certaines régions, les moutons migrent – du latin Migrare : changer de séjour, s’en aller d’un endroit. Migratio: passage d’un lieu dans un autre . Ils migrent pour s’en aller rejoindre un refuge – du verbe latin Refugere: chercher asile. Un berger les accompagne et des chiens dits « de berger » les protègent des loups.
Les moutons ne migrent pas d’eux-mêmes : on les fait migrer pour leur assurer une nourriture qui ne serait plus assurée si ils restaient en place et on les ramènera à l’endroit d’où ils viennent dès que la nourriture y sera de nouveau garantie.

Là s’arrête peut-être l’analogie avec les humains, même si la comparaison et les métaphores humains/moutons sont opérantes dans beaucoup de situations. Qu’il s’agisse de la Syrie, de la Libye, de l’Afghanistan, de l’Éthiopie, du Soudan, de la Somalie, de l’Irak, etc. je ne pense pas que les bergers s’occupaient beaucoup de la nourriture du troupeau. Il me semble que, dans la grande majorité des cas, les bergers ont été maintenus à la tête de leurs troupeaux par ceux qui aujourd’hui reprochent à ces mêmes troupeaux de venir manger chez eux.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce dernier point concernant la continuation du colonialisme dans des sous impérialismes locaux. Mais je concluerai, toujours sous la surveillance du Robert. Dictionnaire historique de la langue française en prétendant qu’il ne s’agit ni de migrants ni de réfugiés*.
Dans la majorité des cas, ils sont en migration vers un refuge qu’ils ne peuvent atteindre. Faute d’atteindre ce refuge, on ne peut pas les qualifier de réfugiés. Il s’agit donc d’humains en train d’émigrer – du latin Emigrare: changer de demeure – mais dans l’incapacité d’être des émigrants car on leur empêche la possibilité de la demeure en se contentant de les mettre « en demeure ».

Ils n’ont jamais eu de berger, jamais de chien « de passeur » pour les protéger des requins. Désormais leur seul berger, leur seul guide, leur seul protecteur, c’est le numérique et leur téléphone portable. Pour aider les humains se déplaçant à travers l’Europe dans l’attente d’un refuge connu ou non encore connu, comment leur permettre de ne pas tomber en panne avec leur téléphone portable ? Le numérique est le seul territoire qui leur reste !

*Dans la définition du Robert sous l’adjectif Réfugié,e, il est intéressant de noter ce commentaire : « il est substantivé avec le même sens (1573), notamment en parlant des protestants français qui durent s’exiler après la révocation de l’Edit de Nantes (1740, au pluriel). » Combien de bons Suisses aux opinions bien tranchées seraient en état de les exprimer si, à l’époque de la migration (sans retour), leurs ancêtres s’étaient confrontés aux idées qu’ils professent? Remarque à élargir à la Hongrie.

A la différence de certains djihadistes qui se salissent les mains en égorgeant des otages, les autorités européennes ne se tachent que rarement avec l’encre des stylos en paraphant les traités internationaux.Aimé Shaman

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