Ecce Homo

L’évocation crépusculaire du bandeau du dernier article provoque un retour (bienfaisant) à Friedrich Nietzsche*.

Après la lecture de Pascal Chabot…

Ces plus grands Sages de tous les temps, il faudrait les voir de près ! Peut-être n’étaient-ils plus, ni les uns ni les autres, très fermes sur leurs jambes ? Peut-être d’un type tardif ? Vacillants ? Décadents ? Peut-être la sagesse n’apparaît-elle sur terre que sous la forme d’un corbeau qu’excite un discret relent de charogne ? (Le Crépuscule des idoles)

L’homme, une petite espèce animale exagérément gonflée, qui – heureusement – n’a qu’un temps ; la vie terrestre même, un instant, un accident, une exception sans suite, quelque chose qui pour le caractère général de la terre reste sans conséquence ; la terre même, comme tous les astres, un hiatus entre deux néants, un événement sans plan, raison, volonté, conscience de soi, la pire sorte de nécessité, la stupide nécessité. Contre cette considération, quelque chose se révoltant nous : le serpent de la vanité nous suggère : « Tout cela doit être faux : car cela révolte… » (Fragments posthumes XIV)

C’est nous qui avons inventé la notion de « fin » : dans la réalité, la fin fait défaut. On est nécessaire, on est un fragment de fatalité, on fait partie d’u tout, on est dans ce tout – il n’y a rien qui puisse juger, peser, comparer, condamner notre être, car cela voudrait dire juger, peser, comparer, condamner le tout. Mais, hors du tout, il n’y a rien. (Le Crépuscule des idoles).

Il faut se donner la peine de toucher du doigt, essayer de saisir cette surprenante finesse : la valeur de la vie ne saurait être évaluée. Pas par un vivant, car il est partie, et même objet du litige, et non juge ; pas davantage par un mort, pour une toute autre raison. De la part d’un philosophe, voir dans la valeur de la vie un problème, voilà qui parle contre lui, voilà qui met en doute sa sagesse, atteste de sa non-sagesse. (Le Crépuscule des idoles).

Ce que je raconte est l’histoire des deux siècles prochains. Je décris ce qui vient, ce qui ne peut plus venir d’une autre manière : l’avènement du nihilisme. (Fragments posthumes XIII)

* Voir le numéro hors-série de philosophie magazine consacré à Nietzsche.

Les minables sont des dieux et les dieux des minables. Comment faire la part des deux sinon faire la part du diable. Aimé Shaman